Steven Raichlen nous dit tout sur l'art du fumage!

Vous voulez fumer vos aliments au BBQ? Lisez les réponses de Steven à nos questions!

Steven Raichlen, le pro du fumoir
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par foodlavie Mis à jour le 4 oct. 2018

La fumée, le Maître du Grill en a fait un métier, la passion d’une vie. D’ailleurs, il a consacré tout un livre sur l’art de fumer. Pro du fumoir, paru aux Éditions de L’Homme, est une mine d’information pour ceux et celles qui veulent s'initier à ce mode de cuisson, ou en peaufiner les techniques. Que vous aimiez le BBQ à l’européenne, à l’asiatique ou à l’américaine, lisez notre entrevue avec Steven Raichlen et apprenez-en plus sur la boucane!

Steven, d’où vient l’idée de fumer les aliments?

Ça a commencé il y a environ 1,8 millions d’années. La méthode principale était au-dessus d’un feu de bois. Le feu cuisait la nourriture, mais lui donnait aussi un goût de fumée. Après le bois, nous avons introduit le charbon, puis le gaz, puis les grils électriques. Si bien qu’on a cessé de fumer les aliments en les cuisant. Je ne pense pas que ce soit un progrès!

En plus de cuire les aliments la fumée a pour objectif d’aider à leur conservation, en partie grâce à la déshydratation, mais aussi grâce au dépôt d’un filtre chimique, qui rebute les insectes et les bactéries. Nos ancêtres préhistoriques et plus récemment les Amérindiens n’avaient évidemment pas de mode de réfrigération et n’avaient pas de source de sel abondante. Mais les feux de camps eux étaient partout et revenaient à chaque soir. On avait tué trop de bisons?  Il suffisait d’en tailler la viande en lanières et de les déposer sur des supports à côté du feu. C’est ainsi qu’est né le Jerky de bœuf. C’était la même chose pour les Amérindiens des côtes, avec le saumon.

Steven Raichlen, le pro du fumoir

Recette de saumon fumé au rhum de Steven Raichlen.

Qu’est-ce que les aliments fumés ont de plus que les autres?   

En plus d’en intensifier la saveur, le fumage ajoute à la texture des aliments, qui deviennent plus moelleux et tendres. L’arôme de fumée aussi est incroyablement appétissante. L’aspect change aussi, puisque la couleur est intensifiée. Fumer les aliments interpelle donc quatre sens.

Il existe du fumage à chaud et à froid. Quelle est la différence entre les deux?

D’abord, il faut distinguer le fumage à chaud et la simple cuisson barbecue. Le fumage à chaud se fait à une température beaucoup plus basse que le grillage des viandes au barbecue, autour de 225°F à 274°F, contre 450°F et 600°F. Le fumage à chaud est donc parfait pour des viandes coriaces, comme la poitrine de bœuf, l’épaule de porc ou les côtes levées, qui autrement, risquent d’avoir une texture élastique. Cette cuisson à plus basse température fait fondre tranquillement les graisses et le collagène des viandes, ce qui les rend plus tendres. Mais on peut aussi utiliser cette technique pour les poissons.


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Et qu’en est-il pour le fumage à froid?

Le fumage se réalise à une température encore plus basse, soit entre 60°F et 150°F. Donc, contrairement au fumage à chaud, les viandes ne cuisent pas, on le voit même dans leur texture. Le saumon fumé qu’on retrouve en majorité sur nos étals est fumé à froid. Le principe est simple : le bois est brûlé dans une section du système, puis la fumée est transportée par un tuyau, le long duquel elle refroidie. Elle entre ensuite dans un autre espace, hermétique et non chauffé, où se trouve les aliments à fumer.

Cette technique est excellente pour les poissons à chaire rosée, comme on le sait, mais elle peut s’appliquer à toute sorte d’aliments auxquels on veut donner un goût de fumée sans les cuire.

Ce n’est pas à portée de tous d’avoir des fumoirs à la maison…

Non, en effet. Il existe maintenant sur le marché des pistolets à fumée (smoking gun) qu’on peut utiliser pour, par exemple, fumer des cocktails – très tendance en mixologie – ou encore qu’on utilise de pair avec les cloches de verres, sous lesquelles on encapsule la fumée, comme on voit dans les restos haut de gamme. Cette technique est d’ailleurs très commode pour ceux-ci, puisqu’ils n’ont pas de fumoirs. 

Cette technique donne réellement un goût de fumée aux aliments?

Non, ça fonctionne vraiment, pourvu que les aliments restent sous la cloche enfumée entre 2 et 4 minutes.  Et pour ce qui est des cocktails, il y a toute une panoplie que l’on peut faire. Le principe de base consiste à remplir une bouteille de fumée à l’aide du pistolet. On y insère le cocktail préparé, on referme le bouchon on agite et on sert. Et voilà.

Y a-t-il des aliments qu’on ne peut pas fumer?

On peut fumer presque n’importe quoi. En fait la fumée est comme le goût umami de l’Amérique du Nord (NDLR : Terme japonais qui désigne l’une des 5 saveurs de base, avec le sucré, l’acide, l’amer et le salé. Il se traduit en français par «goût délicieux»).

Y a-t-il des bois qui sont plus appropriés pour certains aliments?

Bonne question. Dans l’univers du barbecue, le type de bois utilisé est l’équivalent des épices, mais en plus subtil. Le mesquite très prononcé est bon pour le bœuf, le porc et l’agneau, mais pas pour les poissons ni pour la volaille. Le hickory est aussi pas mal prononcé. Il parfait pour le porc. Le chêne est équilibré, ce qui fait qu’on peut l’utiliser tant sur les poissons et les volailles que pour les viandes. Les arbres fruitiers, comme le cerisier ou le pommier, sont excellents pour le saumon, la volaille et certaines parties du porc.

Steven Raichlen, le pro du fumoir

Recette de croustade aux pommes fumée aux biscottis du Maître du Grill

Quel est votre type de bois préféré pour fumer?

Si je n’en n’avais qu’un seul, j’opterais pour le chêne, dont l’intensité est juste assez équilibrée. Sinon, j’adore votre érable. D’ailleurs à pour faire ma dinde de Thanksgiving je m’orgaise toujours, même si je suis en Floride, pour trouver des copeaux  d’érable.

Pourquoi mouille-t-on le bois avant de le chauffer?

Très simple, pour qu’il brûle lentement et produise plus de fumée.

Qu’est-ce que la fumée liquide au juste et qu’en pensez-vous?

Les intellos du barbecue snobent ce produit. Mais c’est en fait un condiment naturel. On le produit en brûlant tout simplement du bois et captant la fumée dans un alambic, puis en l’allongeant un peu avec de l’eau. Dans les année 1980 et 1990, on en a utilisé beaucoup, voire abusé. Certains en ont mis sur des viande bouillies! Ça lui a donné une mauvaise réputation. Il m’arrive de l’utiliser – mais bien rarement – pour renforcer le goût d’une sauce BBQ. On peut faire ça ou la mettre à fumer pendant 3 h. Mais évidemment, rien ne remplace la vraie fumée.

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